Extraits
Chapitre 1 : Images d’antan
La nuit était calme. Un ciel sans lune se dressait au-dessus du 5, chaussée de l’étang. Il n’y avait pas un souffle de vent, les épais feuillages d'été restaient inertes et aucun son de la rue ne parvenait jusqu’à Finn. Cela donnait l’impression que le temps était figé en cet instant. Pourtant, Finn entendit l’horloge du salon sonner un coup, annonçant la demie de minuit. Il fallait donc se tenir prêt, il arriverait très bientôt.
Un sentiment d’anxiété l’envahit. Il n’avait aucune idée de ce à quoi aboutirait cette entrevue. Il ne savait pas même comment son oncle parviendrait à pénétrer dans la maison sans que ses parents ne s’en aperçoivent, car une horloge à coucou trafiquée par Michael Andrew Jefferson, son père, servait de carillon à la porte d’entrée, sonnant à chaque ouverture. Il suivit donc les instructions de son oncle : rester dans sa chambre jusqu’à son arrivée. Assis à côté de la fenêtre, il guettait le moindre mouvement au-delà du portail. Une clochette y était fixée, alors il tendait l’oreille pour percevoir le moindre tintement. Il n’y avait aucune autre entrée au jardin qui était entièrement clôturé de barrières de deux mètres cinquante de haut et pourvues de pics en leurs sommets. Finn se perdit dans ses pensées. Pourquoi son oncle qu’il n’avait pas vu depuis plus de deux ans s’était manifesté si soudainement en exigeant de le voir, insistant sur le fait que ses parents ne devaient absolument pas en être informés ? [...]
[...] Finn se retrouva plongé dans une obscurité totale. Puis un tourbillon d’images défila devant ses yeux, ce qui lui donna le tournis et la nausée. Il ferma les yeux en attendant que ce vertige s’atténue, mais lorsqu’il les rouvrit, il se retrouva debout au milieu d’une rue pavée. Avant qu’il n’ait pu reprendre ses esprits, il entendit un homme crier derrière-lui “Hô la ! Moveth hence fool !” (Hô la ! Bouge de là imbécile !) L’homme avait apparemment parlé en anglais, mais Finn fut surpris de ne pas saisir le sens exact de sa phrase. Il se retourna et fit un bond sur le côté, manquant de se faire renverser par un cheval qui tirait une petite diligence. L’homme qui tenait les rênes du cheval assis à l'avant du véhicule, lui lança un regard noir et continua sa route. [...]
[...] Le téléphone de Finn s’était mis à sonner. Il s’éloigna pour parler en toute tranquillité.
- Allô ?... Allô ? Dit-t-il, mais il n’entendit rien. C’était un numéro masqué.
D’habitude il ne répondait pas quand il ne savait pas qui était au bout du fil, mais il n’y avait pas fait attention cette fois-ci. Il dû sortir dans le jardin tant la machine à expresso faisait du bruit lorsqu’elle était en marche. C’était comme si un avion était en train de décoller. Il écouta attentivement mais il semblait que la personne avait raccroché. Au moment où il allait retourner à l’intérieur, son téléphone se remit à vibrer, c’était le professeur Heymaan.
- Allô ? Répéta Finn. Il n’entendit qu’une faible voix à peine audible. Il semblait que des fréquences interféraient avec cet appel. Il ne percevait que quelques bribes de ce qu’essayait de lui dire son professeur. Des grésillements ressemblant à ceux d’une radio captant mal, entrecoupait ses phrases.
- Phinnaeus… fuis… arrivent pour… maintenant… important… dépêche-toi ! [...]
- He’s here! (Il est là !) S’écria le barbu en pointant du doigt le toit où se trouvait Finn.
Les hommes qui voulaient se diriger vers Finn se firent brutalement éjecter du chemin par un simple geste de bras de Sergei qui était arrivé à pas lourds derrière eux.
- I will take care of this now (Je vais m’occuper de ça maintenant), dit-il, un sourire s’affichant sur ses lèvres.
Finn se sentit alors retomber sur terre et sentit la panique l’envahir tout entier. Il se dirigea vers le bord du bâtiment en accélérant ses petits pas, tout en faisant toujours attention de ne pas glisser sur une plaque de verglas. Sergei le suivait d’en bas en ricanant, exagérant la lenteur de ses pas pour faire comprendre à Finn qu’il n’avait aucune chance.